La Journée mondiale de l’eau 2023 qui a lieu chaque année le 22 mars vise à accélérer le changement pour résoudre la crise de l’eau.
Les membres de notre réseau, qui rassemblent des paysannes et paysans engagés dans des systèmes agroécologiques, tiennent à rappeler que l'eau est un bien commun indispensable à la vie de tous les êtres vivants.
La terre ne se cultive pas sans eau, l’eau ne se gère pas sans la terre. Conditionnée par son grand cycle naturel (précipitations,évaporation, ruissellement, infiltration…), les liens entre l’eau, les sols et donc l’agriculture, sont indissociables. Depuis des siècles, les agriculteurs aménagent l’espace pour gérer l’eau et améliorer leurs conditions de production*.
Des défis et des tensions majeurs
Avec le dérèglement climatique, nous sommes confrontés à des défis majeurs concernant la gestion de l’eau en agriculture. Raccourcissements des cycles végétatifs, pics de chaleur, moindre disponibilité de l’eau dans les sols, les rivières, les nappes et les réservoirs, ainsi que les intrusions salines et risques de précipitations intenses vont fortement impacter l’agriculture et ses usages de l’eau.Au sein du Réseau InPACT nous essayons d'anticiper les évolutions climatiques, et avons depuis longtemps intégrer les questions environnementales dans nos pratiques.
L’agriculture est la première consommatrice d’eau, avec 45% du total. « L’adaptation, ce n’est pas une option, c’est de toute façon une obligation », assurait le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu lors d’une interview*, en août 2022. Il assure que le gouvernement veut « faire passer des messages sur la nécessité et le besoin d’accélérer les transitions » notamment sur l’utilisation de l’eau**.
L’eau à usage agricole sert principalement à alimenter le bétail et irriguer les cultures. Le bassin Adour-Garonne est le plus gourmand (78% du total d’eau consommée est attribuée à l’agriculture), et la région Nouvelle-Aquitaine devrait être particulièrement impactée en matière d’eau par les changements climatiques. La diminution potentielle de la recharge de ses nappes phréatiques pourrait atteindre 30 à 50 % et faire baisser les débits moyens de 20 à 30 % à l’horizon 2030 (Source : Néo terra). Des « tensions » sur le partage de la ressource se font sentir depuis quelques années déjà, et vont s’aggraver à l’avenir. Les débits naturels des cours d’eau et la recharge des nappes souterraines vont diminuer. Dans le même temps, les besoins en eau des plantes vont augmenter, et ce besoin en eau concernera également des cultures traditionnellement non irriguées.
"Refonder notre modèle agricole", Emma Haziza, hydrologue
« Parmi les mesures à prendre le plus vite possible, il y a la refonte totale de notre modèle agricole. Comment nos paysans peuvent-ils sauver l’eau ? Il faut d’abord réhydrater la terre, y remettre de la vie, en particulier du microbiote. Nous savons qu’il y a plus de bactéries dans notre corps que de cellules humaines. Sans nos bactéries, nous n’existerions pas. C’est la même chose pour le sol. Or, en tuant les invertébrés avec des pesticides notamment, on vient tuer la capacité d’un sol à s’oxygéner, à renfermer du carbone et à s’hydrater.
Contrairement à ce qu’on pourrait penser, nous pouvons recréer de petits cycles de l’eau localement avec de bonnes pratiques. Dans un sol hydraté, la transpiration (la rosée) va créer des masses d’air humides qui finissent par retomber 100 km plus loin. C’est un cercle vertueux qu’il faut enclencher. Ce n’est pas le réchauffement climatique qui créé la sécheresse ce sont nos modes de fonctionnement. Le réchauffement global ne vient que s’ajouter à cela.
En intégrant des bandes enherbées par exemple, on réduit l’effet albédo (capacité du sol à réfl échir le rayonnement solaire, ce qui augmente l’effet de serre). Il faut que tout le monde aille dans le bon sens. » Emma Haziza, hydrologue.***
Le Réseau InPACT a travaillé en 2022 à la capitalisation des pratiques mises en place au sein du Réseau dans la Région pour s'adapter au changement climatique. Ces mesures d’adaptation que nous proposons sont pensées avec les paysan-nes et les salarié-es de notre Réseau, de manière à prendre en compte les spécificités locales, les besoins, les contraintes, les techniques. Un chapitre est dédié à l'eau. Vous pouvez le consulter en ligne. Il présente des pratiques qui préservent la ressource en eau, et montre qu'une agriculture moins gourmande en eau est possible.
Téléchargez la brochure "S'adapter ensemble au changement climatique" au format PDF.
*(Extrait avis du CESE « La gestion et l’usage de l’eau », avril 2013)
**«Changement climatique dans les Alpes: interview exclusive des ministres de l’Agriculture et de l’Environnement, unis face aux enjeux», La Provence, 05/08/2022
*** Extrait de «Sécheresse: “Nous avons besoin d’un réveil global”» interview par Hugo Struna, EURACTIV France, 30 juin 2022