Nouvelle-Aquitaine Initiative pour une agriculture
Citoyenne et Territoriale

Lundi 24 juillet nous étions au Conseil Régional pour la présentation de la première version de la fiche Hydraulique du Plan Stratégique Régional (PSR) qui a pour objectif de défnir les projets éligibles aux financements publics.

Une consultation ambitieuse

Suite au lancement le 14 avril dernier (cf. article) de la concertation régionale sur les dispositifs en faveur de l’Hydraulique agricole du PSR (Programme stratégique régional), la Région a reçu un nombre important de contributions dont la nôtre. Afin de clôturer cette concertation, nous étions invités à la présentation du projet de cadre d’intervention de la Région et du FEADER, qui s’inscrit dans le champ réglementaire européen décliné au niveau régional dans le PSR.

La consultation a été très large (professionnels de l'agriculture, scientifiques, DRAAF, DREAL, DDTM Ministère, EPTB, départements, etc.). La Région a fait le choix d’ouvrir le plus largement possible le champ d’interventions des financeurs (hors FEADER) dans le PSR. En préalable, 2 conditions à rappeler : le respect de la réglementation nationale et la présence ou la mise en place de compteur d’eau.

Quels projets éligibles ?

Après le rappel des compétences en matière d’hydraulique agricole, du calendrier à venir, et des étapes passées de cette concertation, les orientations politiques de la Région nous ont été présentées : le RI de la Région et le financement du FEADER visent à financer les projets efficients en eau :

  • Participant à la souveraineté alimentaire de la région (cultures prioritaires)
  • Intégrant la notion de partage de l’eau (priorité au JA / NA et au portage collectif)
  • Favorisant une gestion publique des ouvrages

Cela vaut comme conditions d’attribution des crédits. La biodiversité et la couverture des sols pour retenir l’eau ainsi que la gestion optimisée de l’irrigation pour économiser l’eau sont leurs deux objectifs.

4 grands types de projets sont éligibles :

  1. L'Amélioration des infrastructures collectives

  2. Les réserves de substitution - Infrastructures collectives dans le cadre d’un PTGE

  3. La réutilisation des eaux usées –RéUT

  4. Développement de l’irrigation – projets SANS et AVEC prélèvement dans les masses d’eau

Nous nous réjouissons que la Région ait fait le choix de ne pas intervenir directement sur le financement des réserves de substitutions. Il n'y aura pas de financement Région ni FEADER. La retenue de substitution est souvent plébiscitée par la profession agricole car sécurisante à court terme. Selon nous, ces infrastructures ne sont malheureusement pas viables à long terme car elles nuisent à la fois aux milieux naturels et au bon fonctionnement du cycle de l’eau. En effet, stocker l’eau empêche celle-ci de s’infiltrer dans les sols, les nappes phréatiques peinent à se reconstituer, ce qui provoque une modification du fonctionnement hydrologique des bassins versants. Nous reconnaissons l'utilité de l'irrigation pour certaines productions et sous certaines conditions. Néanmoins il nous apparaît que la construction de réserves de stockage dites "méga-bassines" va à l'encontre de l'agriculture prônée dans la feuille de route Néo-Terra et dans la Stratégie Régionale de l’Eau. 

Toutefois, la Région apportera son soutien indirectement (Hors Fiches PSR Hydraulique ) via l’amélioration de l’efficience en eau des exploitations engagées dans les projets de substitution:

  • Accompagnement technique (conseil, diagnostic)
  • Investissements sur l’exploitation / équipements à la parcelle

Néanmoins nous nous inquiétons du développement de l’irrigation via des projets AVEC prélèvement dans les masses d’eau, même si celles-ci doivent être à l'équilibre.

Nos propositions

Notre Réseau a fait part de ses propositions au cours du printemps. Nous avons tenu à rappeler que l'EAU EST UN BIEN COMMUN indispensable à la vie de tous les êtres vivants. Dans un contexte de sécheresses qui se multiplient, il va falloir la partager, la préserver et la retenir par un changement des méthodes culturales. En effet, l'eau fait partie du bien commun de la nation. Sa protection, sa mise en valeur et le développement de la ressource utilisable, dans le respect des équilibres naturels, sont d'intérêt général.

L'urgence pour nous est d'aider à remettre en fonction le cycle de l'eau par du stockage dans des sols vivants (grand oublié de la gestion de l’eau) et les plantes et non par du stockage dans des réserves surdimensionnées qui n’existent qu'au profit d’une minorité. Accélérer la sobriété pour préserver une ressource limitée et réduire la dépendance de l’agriculture à l’irrigation devrait donc être des actions prioritaires.

L'agriculture doit s'adapter aux ressources mobilisables et non pas l'inverse. Il faut inciter les agriculteurs à s'engager dans des systèmes durables pour une gestion responsable tant de la quantité que de la qualité de l'eau, dans des systèmes agronomiques plus vertueux (rotation des cultures, moindre recours aux pesticides, diversification...).

Des solutions de stockage et des systèmes d’irrigation efficaces existent déjà dans de nombreuses fermes agro-écologiques. Il faut donc avant tout sortir d’un système agro-industriel toujours plus  gourmand en eau et privilégier ces solutions déjà mises en œuvre par l’agriculture citoyenne et territoriale que nous défendons.

Il nous paraissait indispensable et urgent que le plan en matière d’hydraulique agricole soit aussi un plan d’accompagnement technique et financier des agriculteurs pour les aider et les inciter fortement à changer rapidement de pratiques. Si nous continuons comme avant à répartir une eau qui se raréfie de plus en plus, les conséquences seront à la fois tragiques pour l’agriculture, pour la population et pour la biodiversité sur nos territoires. Nous pouvons construire tous les réservoirs, toutes les retenues que l’on souhaite, s'il ne pleut plus ils resteront vides et les nappes phréatiques aussi. En revanche, en adoptant rapidement de bonnes pratiques, nous maintiendrons un climat auquel nous pourrons nous adapter et nous éviterons l'insécurité alimentaire. 

20220519 151058 1332 444Nos priorités 

  1. Réduire la consommation d’eau par l’irrigation : quelle que soit l’infrastructure de stockage améliorée ou créée, la recherche d’économie d’eau doit être recherchée (via par exemple l’amélioration du matériel (15-25% d’économie d’eau possible), le perfectionnement du pilotage de l’irrigation (10 à 40 % d’économie possible)). Les économies d’eau doivent être recherchées y compris pour les masses d’eau actuellement jugées dans un état « bon ».
  1. Favoriser les cultures nourricières (le maïs demeure, et de loin, la principale culture irriguée dans la Région, représentant à lui seul près de la moitié des surfaces irriguées)
  1. Encourager la récupération d’eau de pluie et la Réutilisation d’Eaux Usées Traitées (REUT) pour l’irrigation (ces dernières sont une ressource sous-exploitée en France par rapport à d'autres pays et elle présente plusieurs avantages, mais ne doit pas se faire au détriment des besoins en eau du milieu aquatique ni sans réflexion sur sa pertinence énergétique globale.)
  1. Favoriser des systèmes naturels de stockage de l'eau

Nous restons vigilants

Il nous paraissait indispensable que le catalogue des éco-conditionnalités imposées soit exigeant. Il l'est, nous reconnaissons les avancées de la Région, mais il ne va pas assez loin pour nous. Que ce soit sur le point 1 mais particulièrement sur le point 4, nous restons vigilants sur les détails de ces financements. Le Budget FEADER pour les mesures Hydraulique est de 20 millions d'euros. Nous regrettons qu'une telle somme soit encore allouée à l'irrigation.

Le Comité de suivi se réunira à nouveau en octobre en amont du vote du Règlement d’intervention hydraulique qui aura lieu en séance plénière le 16 octobre prochain dans le cadre d’une délibération « Agriculture et eau » du Conseil régional. Les dispositifs seront effectifs à partir du 1er novembre.